Découverte d’un domaine sous-estimé
Le secteur DePIN, ou « Decentralized Physical Infrastructure Networks » (réseaux d’infrastructures physiques décentralisés), connaît actuellement une véritable effervescence. En combinant la blockchain et la cryptomonnaie, ce domaine vise à créer des infrastructures physiques plus efficaces et transparentes. Ces réseaux incluent des infrastructures comme les réseaux sans fil, les systèmes énergétiques ou encore les solutions de stockage de données. La question qui se pose est: cette hype autour du DePIN est-elle justifiée ou s’agit-il d’une simple promesse exagérée qui ne tiendra pas ses engagements?
Les atouts indéniables du DePIN
L’un des aspects les plus fascinants du DePIN est son potentiel à sortir de la sphère purement crypto pour offrir des solutions concrètes à des utilisateurs lambda. Prenons l’exemple de Helium Mobile, une entreprise qui a mis en place un réseau mobile décentralisé basé sur ses utilisateurs, offrant une connectivité 5G à des tarifs très compétitifs. Ce modèle a déjà prouvé son efficacité, avec une adoption rapide. Leur stratégie repose sur un token incitatif, récompensant les utilisateurs pour l’installation de hotspots et l’adhésion à leurs plans mobiles. En décembre 2023, les utilisateurs pouvaient gagner environ 6$ par jour tout en souscrivant à un abonnement mensuel à 20$, simplement en utilisant leur téléphone comme d’habitude. Le succès rapide de ce projet démontre clairement que le DePIN n’est pas qu’une mode passagère. Il génère des revenus réels basés sur l’utilité.
Un modèle basé sur des cas d’usage solides
Le secteur DePIN génère actuellement plus de 15 millions de dollars de revenus on-chain annuels grâce à six modèles économiques distincts. Si ce chiffre peut sembler modeste à première vue, il est impressionnant compte tenu du fait qu’il s’agit de revenus basés exclusivement sur la blockchain, sans dépendre des modèles Web 2 classiques. Lors du dernier cycle de marché, alors que de nombreux secteurs vacillaient, le DePIN s’est révélé remarquablement résilient grâce à des cas d’utilisation concrets. Pour les investisseurs, cette résilience offre une évaluation basée sur des critères tangibles tels que l’adoption, le pricing et la qualité du service, contrairement à la simple spéculation basée sur le buzz.
Parmi les exemples notables, on trouve Render Network, un projet majeur fournissant des services de rendu GPU distribués, ou encore Livepeer, un réseau de streaming vidéo décentralisé qui concurrence des mastodontes comme YouTube et Twitch. Ces projets montrent que le DePIN ne se contente pas de promesses : il génère des revenus en résolvant des problèmes réels.
L’avenir du DePIN dans l’ère de l’IA
Ce qui rend le DePIN encore plus intéressant, c’est son potentiel à devenir un acteur clé dans la révolution de l’intelligence artificielle (IA). À mesure que les applications d’IA deviennent plus complexes, elles nécessitent une puissance de calcul toujours plus grande. Actuellement, les géants de la tech se ruent sur les GPU de Nvidia, créant des pénuries et des délais de livraison considérables. Si cela profite à Nvidia, les petites entreprises et les startups, elles, peinent à suivre.
Là où le DePIN peut réellement briller, c’est dans le développement de marchés de calcul décentralisés. Ces plateformes permettent aux utilisateurs de louer leur puissance GPU inutilisée à d’autres. Individuellement, ces GPU ne semblent pas être une solution viable, mais lorsqu’ils sont connectés via un réseau mondial, ils offrent une capacité de calcul énorme à des coûts largement inférieurs aux solutions centralisées, avec des économies allant jusqu’à quatre fois moins cher. Cela pourrait transformer le secteur pour les petites entreprises et les équipes universitaires qui n’ont pas les moyens d’acheter du matériel coûteux.
L’attraction des grands investisseurs pour le DePIN
L’un des principaux indicateurs de la viabilité du DePIN est l’intérêt croissant des investisseurs institutionnels. À ce jour, les projets majeurs du secteur ont levé plus de 1 milliard de dollars auprès de fonds tels que Fenbushi Capital, NGC Ventures et Multicoin Capital. L’Asie, en particulier, commence à jouer un rôle crucial dans le développement de ce secteur. Des fonds et des programmes d’accélération comme celui de Future Money Group, qui a récemment lancé un programme de 5 millions de dollars en collaboration avec IoTeX, sont de plus en plus fréquents. Cette région, grâce à sa capacité de fabrication et au soutien politique pour le Web3, pourrait devenir un centre névralgique pour l’innovation DePIN dans les années à venir.
L’importance du récit dans le secteur DePIN
Dans le domaine de la cryptomonnaie, le pouvoir du récit est indéniable. Que cela nous plaise ou non, la narrative qui entoure un projet ou un secteur influence souvent plus que les fondamentaux eux-mêmes. C’est là que le DePIN se distingue, avec un récit qui prend de plus en plus d’ampleur. En effet, cette tendance commence à dominer l’espace crypto. Les chiffres confirment cette montée en puissance. En deux ans, la capitalisation totale du DePIN est passée de 1% à 5% du marché global des cryptos. Et ce n’est qu’un début. Les projections montrent que le secteur pourrait atteindre une valeur astronomique de 3.5 trillions de dollars d’ici 2028, soit une augmentation de 150 fois sa capitalisation actuelle, estimée à 20 milliards de dollars.
Malgré ces perspectives impressionnantes, le DePIN reste largement sous-estimé. Actuellement considéré comme une niche, sa capitalisation boursière combinée demeure relativement faible. Cependant, à mesure que le marché évolue et que la notoriété de ces projets grandit, leur valeur pourrait littéralement exploser. Regardez simplement ce qui s’est passé avec Filecoin en 2021, qui a réalisé un x10 en un trimestre, ou avec Helium, qui a vu sa valeur multipliée par 100 en un an. Ces exemples illustrent que même si le DePIN est encore jeune, il pourrait représenter une opportunité exceptionnelle pour ceux qui s’y intéressent tôt.
Les défis et limites du secteur DePIN
Un manque de reconnaissance grand public
Après avoir exploré les avantages du DePIN, il est essentiel de rester réaliste et d’examiner ses limites. Le premier défi majeur est le manque de reconnaissance auprès du grand public. Si vous mentionnez des projets comme Biocoin ou Helium lors d’un dîner, il est fort probable que vous receviez des regards perplexes. En dehors de la sphère crypto, le DePIN est quasiment inconnu et cela s’explique en partie par la complexité technique de certains projets. Prenons l’exemple de Filecoin, dont le fonctionnement repose sur des concepts tels que la preuve de réplication et la preuve d’espace-temps. Ces termes, difficiles à comprendre pour la majorité des gens, freinent l’adoption massive de ce type de technologies.
Pour atteindre son plein potentiel, le DePIN devra donc se concentrer sur l’éducation et la sensibilisation. Il est impératif de rendre ces projets plus accessibles grâce à des interfaces plus conviviales et à des cas d’utilisation concrets. Si cet effort n’est pas réalisé, le DePIN risque de rester confiné à un marché de niche, ce qui limiterait son expansion.
Les barrières à l’entrée élevées
Un autre obstacle notable dans le secteur DePIN est le coût élevé de participation. La mise en place de l’infrastructure nécessaire pour un projet DePIN est coûteuse. Prenons l’exemple du réseau ICP, un projet DePIN dont le coût d’entrée pour un opérateur de nœud avoisine les 25’000 dollars. Un investissement aussi élevé peut décourager les petites entreprises et les opérateurs individuels, rendant le secteur moins accessible. Par ailleurs, pour des projets comme Helium, l’achat d’un hotspot coûte entre 249 et 499 dollars, sans garantie de gains en HNT sur la durée de vie de l’appareil. Ces coûts pourraient freiner la croissance des projets DePIN, notamment dans les pays en développement où les ressources financières et matérielles sont plus limitées.
Les risques et menaces pour le DePIN
Les défis liés à la chaîne d’approvisionnement
Un autre risque majeur auquel le DePIN est confronté est celui de la chaîne d’approvisionnement des appareils. De nombreux projets dépendent de matériels propriétaires pour construire leur réseau, ce qui les rend vulnérables à tout problème de fabrication ou de distribution. Un exemple frappant est celui de Planet Watch, un réseau de surveillance de la qualité de l’air qui a dû revoir sa stratégie lorsque son fournisseur de capteurs a cessé de collaborer. Cette dépendance excessive à une seule source de matériel peut s’avérer catastrophique pour des projets en phase de démarrage.
Certains projets tentent de contourner ce problème en adoptant des designs open-source ou en établissant des partenariats avec différents fabricants, mais le risque persiste. Une chaîne d’approvisionnement centralisée menace l’intégrité même de l’idée de décentralisation, pierre angulaire du DePIN.
Concurrence avec les géants centralisés
Enfin, même si un projet DePIN réussit à surmonter tous ces obstacles, il reste la concurrence féroce des géants centralisés. Sur des marchés comme celui du cloud computing, des entreprises comme Amazon Web Services, Microsoft Azure et Google Cloud dominent grâce à leurs infrastructures massives et leurs ressources financières illimitées. Ces géants rendent extrêmement difficile pour les projets DePIN de se faire une place.
Certaines entreprises, comme Cloudflare, développent également des solutions similaires au DePIN, ce qui en fait des concurrents directs. De plus, il ne serait pas surprenant que ces grandes entreprises finissent par acquérir certains projets DePIN prometteurs ou développent leurs propres solutions pseudo-décentralisées. Pour réellement concurrencer ces titans, les réseaux DePIN devront offrir bien plus que de la simple décentralisation. Ils devront proposer des performances supérieures, des coûts réduits et des fonctionnalités uniques que les solutions centralisées ne peuvent pas reproduire. Cela reste un défi de taille, et il est possible que le DePIN se limite à desservir une clientèle spécifique sans jamais bouleverser le marché dominé par les géants centralisés.