Un tournant décisif pour l’écosystème crypto
L’effondrement retentissant de la cryptomonnaie Terra (Luna) et de son stablecoin algorithmique UST en mai 2022 a marqué un tournant majeur pour le marché des cryptomonnaies. Il a provoqué une onde de choc qui a ébranlé la confiance des investisseurs et révélé les vulnérabilités des projets à haut risque. Cet événement a entraîné une chute spectaculaire des volumes de transactions sur les plateformes d’échange centralisées (CEX), notamment pour la paire BTC/USD, qui constitue un baromètre clé de l’activité du marché.
En juillet 2022, les volumes hebdomadaires moyens de cette paire avaient atteint un pic impressionnant de 2.9 millions de bitcoins, reflétant une période de forte spéculation et d’activité frénétique sur les bourses. Cependant, ces volumes se sont effondrés pour atteindre seulement 426’000 dollars lors de la séance d’hier, soit une chute de plus de 85% en moins de trois ans. Cette baisse drastique témoigne d’une transformation profonde des dynamiques de marché, marquée par une prudence accrue des investisseurs et une réduction de la liquidité sur les CEX. Cela a aussi entrainé un déplacement des capitaux vers des solutions alternatives comme les portefeuilles décentralisés (DEX), les protocoles DeFi ou les options de custody hors exchanges.

Moins de Bitcoin sur les CEX : un signal haussier à long terme ?
Cette diminution des volumes de transactions sur les CEX peut être interprétée comme un signal haussier à long terme pour le Bitcoin, bien que cette perspective nécessite une analyse nuancée. En réduisant l’offre de Bitcoins immédiatement disponible sur les plateformes d’échange, cette baisse des volumes exerce une pression à la hausse sur le prix, conformément à la loi fondamentale de l’offre et de la demande. Lorsque moins de Bitcoins sont proposés à la vente sur les bourses, une demande constante ou croissante, qu’elle provienne d’investisseurs particuliers, d’institutions ou de fonds cherchant à diversifier leurs portefeuilles, peut entraîner une appréciation du prix.
Ce phénomène est d’autant plus pertinent dans un contexte où l’offre totale de Bitcoin est plafonnée à 21 millions d’unités, avec une émission de nouveaux BTC qui diminue progressivement à chaque halving (le dernier ayant eu lieu en avril 2024, réduisant la récompense des mineurs à 3.125 BTC par bloc). Par ailleurs, la tendance croissante à l’accumulation de Bitcoin par des « hodlers », ces investisseurs qui conservent leurs actifs à long terme, accentue cette raréfaction de l’offre sur les CEX, renforçant potentiellement la
dynamique haussière.
Prudence et facteurs externes à considérer
Cependant, ce signal haussier doit être contextualisé par plusieurs facteurs macroéconomiques et microéconomiques. D’une part, la baisse des volumes pourrait refléter une méfiance persistante à l’égard des CEX, exacerbée par des scandales passés comme celui de FTX en novembre 2022, qui a mis en lumière les risques liés à la centralisation et à la gestion opaque de certaines plateformes.
Les investisseurs, qu’ils soient institutionnels ou particuliers, pourraient privilégier des solutions de stockage à froid (cold wallets) ou des plateformes décentralisées, réduisant ainsi l’activité sur les CEX. D’autre part, des conditions macroéconomiques globales, comme les hausses des taux d’intérêt par les banques centrales pour lutter contre l’inflation ou les incertitudes géopolitiques, pourraient freiner l’appétit pour les actifs risqués comme le Bitcoin, limitant temporairement la demande. De plus, les évolutions réglementaires dans des juridictions clés, comme les États-Unis ou l’Union européenne, pourraient influencer la liquidité et l’adoption du Bitcoin en imposant des restrictions sur les CEX ou en favorisant des cadres plus stricts pour les transactions crypto.
Une redistribution plus qu’un ralentissement de l’activité
En outre, on peut aussi noter que la baisse des volumes sur les CEX ne signifie pas nécessairement une réduction globale de l’activité sur le marché du Bitcoin. Les volumes sur les DEX, les transactions peer-to-peer ou les flux institutionnels via des ETF Bitcoin (comme ceux approuvés aux États-Unis en 2024) pourraient compenser cette diminution, suggérant une redistribution plutôt qu’une disparition de l’activité. Une analyse approfondie des données on-chain, comme les mouvements de BTC vers des adresses de long terme ou les variations des réserves des exchanges, serait nécessaire pour confirmer cette hypothèse. Par exemple, des rapports récents indiquent que les réserves de Bitcoin sur les principales plateformes comme Binance, Coinbase et Kraken ont atteint des niveaux historiquement bas, ce qui corrobore l’idée d’une réduction de l’offre disponible.
Entre opportunités et vigilance
La chute des volumes de transactions de la paire BTC/USD sur les CEX, passant de 2.9 millions de BTC en juillet 2022 à 426’000 récemment peut être perçue comme un indicateur haussier à long terme, en raison de la raréfaction de l’offre de Bitcoin sur les bourses. Toutefois, cette perspective doit être tempérée par une analyse des dynamiques plus larges du marché, incluant les comportements des investisseurs, les évolutions technologiques comme l’adoption du réseau Lightning pour les transactions rapides et les incertitudes réglementaires. Pour les investisseurs, ce contexte suggère une opportunité potentielle mais également la nécessité d’une vigilance accrue face à la volatilité inhérente au marché des cryptomonnaies.